Nombreux sont les chefs d’entreprises, depuis le mois de mars 2020, en raison de la crise sanitaire et de l’impossibilité d’exploiter leurs fonds de commerce, à ne pouvoir honorer pleinement le paiement des loyers commerciaux.
La loi de 1020- 1379 du 14/11/2020 et le décret numéro 2020- 1766 du 30/12/2020 prévoient que les personnes exerçant une activité économique affectée par une mesure de police administrative n’encourent pas de sanction pour le retard ou le non-paiement des loyers ou charges locatives afférents aux locaux professionnels ou commerciaux où leur activité est normalement exercée.
Cette dérogation court jusqu’ à l’expiration d’un délai de 2 mois à compter de la date à laquelle leur activité cesse d’être affectée par ladite mesure de police.
Les conditions pour bénéficier de cette dérogation sont les suivantes :
- Leur effectif salarié est inférieur à 250 salariés
- Le montant de leur chiffre d’affaires constaté lors du dernier exercice clos est inférieur à 50 millions d’euros
- Leur perte de chiffre d’affaires est d’au moins 50 %
Il existe toutefois des cas dans lesquels les loyers commerciaux demeurent dus, car n’entrant pas dans le cadre des critères ci-dessus définis, les exploitants rencontrant toutefois d’importantes difficultés économiques dans l’exercice de leur activité.
Cela a pu conduire les bailleurs à solliciter la résiliation du bail commercial pour non-paiement des loyers.
La tendance des tribunaux s’avère toutefois être à la tolérance.
Ces derniers ont pu considérer, que le non-paiement des loyers ne pouvait pas être justifié par le non-respect de l’obligation de délivrance faite au bailleur, dans la mesure où l’impossibilité d’exploiter normalement ne relève pas de leur fait, mais des conséquences de la crise sanitaire.
De la même manière, il a été considéré qu’il ne s’agissait pas non plus d’un cas de force majeure.
En revanche, certaines juridictions et notamment la cour d’appel de Paris ont retenu la notion de bonne foi dans l’exécution des contrats et en ont déduit que les parties sont tenues en cas de circonstances exceptionnelles, de vérifier si lesdites circonstances ne rendent pas nécessaire une adaptation des modalités d’exécution de leurs obligations respectives.
Les juridictions ont pu dès lors considérer que la crise sanitaire, les répercussions qu’elle a engendré sur l’exploitation du locataire et les négociations ayant échoué entre les parties, peuvent correspondre à des circonstances exceptionnelles nécessitant un aménagement des loyers dus pendant la période visée.
Dès lors, il a été considéré que l’action du bailleur visant l’acquisition de la clause résolutoire et donc la résiliation du bail, faisait l’objet une contestation sérieuse, de sorte que l’action ne pouvait aboutir.
Il semble donc que la tendance de la jurisprudence soit à l’obligation de négociation s’agissant des modalités de paiement des loyers commerciaux.
Cela pourrait donc laisser à penser, que dans l’hypothèse où le preneur ferait la démonstration de sa bonne foi et de sa tentative de recherche d’un compromis entre son bailleur et lui-même, il pourrait bénéficier de délais de paiement ordonnés par le tribunal et conserver le bénéfice de son bail commercial, les tribunaux refusant dans ce cas, de prononcer la résiliation du bail sur le fondement de la clause résolutoire pour non-paiement des loyers.
Céline PIRET
Droit des affaires