Droit de la construction : la Cour de cassation adopte une position constante.
En effet, elle considère un ouvrage impropre à sa destination dès qu’une non-conformité crée un risque, même non réalisé dans le délai décennal.
Ainsi, la seule existence d’un danger suffit à caractériser l’impropriété.

1. L’origine : le non-respect des règles parasismiques

Tout d’abord, la Cour de cassation affirme clairement cette solution en matière de règles parasismiques.
En réalité, ces règles visent avant tout la protection des personnes et des biens.

Dans son arrêt du 11 mai 2011, la Cour juge que le non-respect des normes parasismiques compromet la solidité de l’ouvrage.
Dès lors, elle estime que cette non-conformité rend l’ouvrage impropre, sans exiger la survenance d’un séisme.

Par conséquent, la Haute juridiction censure la cour d’appel.
Elle rappelle, en outre, que la non-conformité constitue, en elle-même, un facteur certain de risque.
Ainsi, ce risque suffit à mobiliser la garantie décennale.

En définitive, la Cour adopte une logique préventive.
Autrement dit, elle retient l’impropriété dès lors que l’ouvrage est exposé à un danger avéré.
Dès lors, un tel danger demeure incompatible avec l’usage normal de l’ouvrage.

2. Une jurisprudence étendue aux autres non-conformités dangereuses

Ensuite, la Cour de cassation ne limite pas cette théorie aux seules règles parasismiques.
Au contraire, elle étend progressivement l’impropriété-dangerosité à d’autres non-conformités affectant la sécurité.

Ainsi, elle reconnaît qu’un risque sanitaire grave suffit à caractériser l’impropriété.
Dès lors, la réalisation effective du dommage n’est pas exigée dans le délai décennal.

De même, elle adopte la même solution pour les défauts de conformité aux règles de sécurité incendie.
En effet, ces défauts constituent un risque sérieux de perte de l’ouvrage.

Dans ces hypothèses, la non-conformité apparaît dans le délai décennal.
Par conséquent, elle constitue un facteur objectif et avéré de risque.
Ainsi, l’absence de sinistre n’empêche pas l’engagement de la responsabilité décennale.

3. Une fausse exception au principe de gravité décennale

Cependant, cette jurisprudence ne constitue pas une véritable dérogation au principe de gravité décennale.
En effet, la garantie décennale reste subordonnée à un désordre grave dans les dix ans suivant la réception.

En réalité, la non-conformité existe bien dans le délai décennal.
De plus, la gravité résulte d’un risque de perte de l’ouvrage ou d’atteinte à la sécurité.
Ainsi, seule la réalisation du sinistre est écartée.

En conclusion, la Cour adopte une interprétation finaliste et préventive de l’impropriété à destination.
Dès lors, un risque objectivement établi suffit à engager la responsabilité décennale.

Sarah HUOT

Avocat Associé Spécialiste en Droit Immobilier